samedi 29 septembre 2018

COSTUME XIVe

DES VETEMENTS POUR L'ETERNITE
Parlons d'autres chausses

Rudolf IV de Habsbourg, Wien Museum.

Un petit break dans la méthodologie... Vraiment ?
On va parler d'une jolie pièce archéologique, qui se diffuse bien par les photos.
Les chausses de Rudolf IV de Habsbourg (1339-1365).
L'objet a été trouvé dans la tombe de Rudolf, dans la cathédrale de Vienne.

La photo se trouve sur pirterpest, et sous deux versions.

et là

Des chausses qui font plus de 150 cm de long et ont des manches... Ca choque personne ?

On ne va pas ergoter longtemps car c'est encore un bel exemple de mauvaise documentation.
Je précise que d'autres pages pinterest ont une légende un peu plus correcte. (Ouf)
Le pire c'est que les deux pages précédentes renvoient à l'image d'origine sur le site kostym.cz
Sur ces deux pages pinterest on a : une explication de l'objet archi-fausse, et une localisation tout aussi fausse (alors que sur le site d'origine, c'est correct...)

Cékoidonk cet objet ?

Ce ne sont pas des chausses conservées au Kunsthistorisches Museum de Vienne, mais un suaire conservé au Dom Museum de Vienne.
Ne chipotons pas, la ville et le propriétaire sont justes.
Mais quand même, quoi... Y a de quoi y perdre son latin !

On a une pièce qui est exceptionnelle, par son aspect, et elle se fait allègrement massacrer par des personnes qui ont du mal à recopier la légende correctement. Et ensuite, un bel effet boule de neige, par reprise de la page pinterest...

Ce qu'on a là, c'est une pièce fascinante en tant que costume funéraire. Le linceul de Rudolf IV, qui est dans un bon état de conservation, comparés aux quelques cm² qu'on croise régulièrement, est une sorte de combinaison qui enveloppait tout le corps. La grande particularité, c'est que les jambes et les bras étaient enveloppés indépendamment. On voit ainsi la forme des jambes, et celle des bras. Les manches ayant d'ailleurs été coupées dans la continuité du tissu des jambes.
Le tout est coupé dans un tissu d'origine perse (en soie, évidemment)

Un tissu qui vaut son pesant de caramel mou


C'est un objet unique, sous cette forme.

On a quelques autres exemples de tenues qui ont été confectionnées dans un but uniquement funéraire. Je vous renvoie à ce très bon article de Tasha sur les tenues funéraires bohémiennes :
 La Cotte Simple
Certains sont, comme la "combinaison de plongée" (oui, je lui ai donné ce surnom un peu stupide mais qui donne bien une idée de l'objet... Il n'y a pas de cagoule, hein !), des vêtements importables par des personnes qui ont besoin de bouger (vivantes, donc).  Mais, qui ont la forme générale des vêtements contemporains. Ce qui n'est pas le cas à Vienne.

Rudolf IV, un portrait médiéval historique

Le grand intérêt de ces pièces pour ceux qui travaillent sur le costume médiéval c'est de montrer que lorsqu'on a une inhumation habillée, les gens n'étaient pas forcément vêtus de ce qu'ils portaient de leur vivant.
Cela pose énormément de questions. Déjà, lorsqu'on a des fragments, une couture ne veut pas toujours dire qu'il s'agit d'un vêtement. Cela peut être un linceul (les coutures de lin ne survivent aussi pas toujours, ce qui n'aide pas). Est-ce que d'autres exemples de ces types, pris pour de vrais vêtements (fragmentaires) existent ? Est-ce que c'est une particularité régionale, familiale ? Quelle confiance accorder dans les fragments ? Est-ce que certains tissus n'auraient pas des destinations spécifiques ? Quels types de vêtements portaient les morts, surtout princiers ? Quel est le sens de l'utilisation de telle ou telle étoffe ? Etc., etc.

(calt/m6/A. Astier)

Ce qui aiderait, déjà, c'est de faire attention à la source, et bien lire les légendes.
Ca peut être vaguement utile.
(Je me demande si le KHM a eu beaucoup de demandes concernant les chausses de Rudolf IV, tiens...)

Est-il besoin de préciser qu'il n'est pas recommandé d'imiter ce vêtement sauf si on veut faire le mort ?

Et, en passant quelques jolies petites choses du Dommuseum de Vienne, un petit musée qui mérite d'être vu :
Nativité avec donateur


Une Annonciation
Une Vierge ouvrante

Un beau manuscrit carolingien
Et je ne vous montre pas les petites pièces brillantes...

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