dimanche 12 août 2018

RIONS UN PEU (beaucoup)

MES DEBUTS HONTEUX
10 ans plus tôt... 
C'est beau, mais pahisto.

J'avais déjà fait un petit sujet sur ma première robe XIIIe qui s'avère maintenant être totalement pahisto, et pourquoi.
Mais, cette robe datait de 2011.
On remonte dans le Tardis, et on va en 2007-2008, pour mes premières créations soi-disant histo.
Je vous préviens, c'est du lourd (et moi aussi en plus !)
Le pire, c'est que ça a été considéré comme correct à cette lointaine époque. Ca en dit long sur la progression des connaissances depuis.

On va vraiment bien rigoler !
En même temps, passé l'hilarité bien compréhensible, on pourra s'arrêter sur le pourquoi du comment que ça va pas finalement. Cet article n'est pas que pour rire un bon coup de mes débuts honteux. C'est aussi pour montrer que :

1.On peut partir de très loin, et arriver à faire du travail sérieux quand on prend conscience de ses défauts, qu'on les accepte, qu'on va demander aux bonnes personnes et qu'on se remet en question (et qu'on arrête de prendre le net pour la panacée)
2. On en apprend tout le temps
3. La reconstitution a quand même évolué (Même si ça va moins vite que la recherche).
4. Faut assumer ses boulettes, même si elles sont énormes.
5. J'ai quand même perdu un peu de volume en 10 ans finalement.
6. Moi aussi, j'ai joué à : Playmobil, En avant les histoires !

Bref, au début, je voulais faire du Haut Moyen Âge (j'ai toujours aimé l'art méro et l'art caro... Beaux bijoux, belles enlus...) et il commençait à y avoir du mouvement à ce niveau là. Et puis, j'aimais bien ce qui se faisait niveau "anglo-saxon".(Les guillemets s'imposent)
J'avais aussi déjà conscience de certaines choses qui étaient histos et qui ne l'étaient pas... Mais, pas trop...
Et comme je débutais, j'écoutais les avis des gens qui étaient là depuis plus longtemps que moi.

Et donc, ça a donné ça, du Xe, XIe digne d'intérêt...


Si, c'est supposé être du anglo-saxon. (J'ai très honte... Très très honte).
Alors qu'est ce qui ne va pas ?
Tout ! (je rappelle que c'était considéré histo)
On commence par la sous-robe en lin bleu. J'ai pas besoin d'aller plus loin. Un lin bleu comme ça, à l'époque, en Europe occidentale... Euh... Comment dire ?
La robe trop courte (mais on pensait que ça se portait comme ça, hein... Merci les idées reçues sur le Moyen Âge). En plus, robe en drap de laine, donc, valable à partir du XIIe
L'aumônière... Pour l'époque, c'est pas top. Mais fallait un truc assez grand pour mettre les papiers de la voiture, les clés et les lunettes... L'excuse habituelle des grandes aumônières.
La guimpe. Elle sert de chiffon maintenant.
Et le magnifique manteau en satin bleu. Sachant que le satin arrive en Europe dans les dernières décennies du XIIIe.
Le manteau est brodé, en prime. 
La doublure en soie jaune, en revanche, elle était ok. Un truc de juste dans le costume !

Crédibilité Hollywood : 10/10
Crédibilité histo : 1/10 (merci la doublure du manteau)

La petite soeur bleue

Pas de voile ni manteau là... Et pas faire gaffe aux bottes, c'était une sortie musée en demi-costume, pour rigoler. Et comme ça, on voit encore mieux ce qui ne va pas.

Sous robe en lin bicolore. Pareil, le rouge, il aurait coûté une fortune...
Robe sur le même patron que l'autre... Mais, un mieux : sergé de laine.
Broderies sur lesquelles j'ai passé des heures.
Overdose de galons.
Je cause même pas des bijoux.
Costume considéré comme histo à l'époque. 
Crédibilité Hollywood 10/10
Crédibilité histo : 1,5/10 (pour les fils de couture et la robe en sergé)

Une petite dernière

Et on applaudit la robe en lin bleu... (pas trop saturé), le sac, le voile qui va pas tellement... Finalement, en laine, elle aurait peut-être pu passer celle là. Mais voilà, c'est du lin, et on n'est pas au Pays de Galles (indépendant).
Crédibilité Hollywood : 10/10
Crédibilité histo : 3/10...

Je précise d'ailleurs que les costumes de ce type ont passé le contrôle à Hastings (enfin, Battle) sans problème... (Ceci dit, j'avais arrêté la robe plus courte, j'étais passée à la robe blousée, qui est moins fantaisiste)

Comment j'ai grandi ?
Première chose, beaucoup de conseils donnés sur internet se sont révélés totalement foireux quand j'ai commencé à avoir une bibliothèque et à vérifier ce qu'on m'avait affirmé (en citant les livres que j'avais en main... La vérification a montré que c'était l'exact contraire qui était écrit, parfois).
Ensuite, un jour... Je devais faire un article sur un certain costume... (C'est dire à quel point mes costumes étaient considérés corrects dans les milieux de la reconstit). Mais, justement, je commençais à me poser des questions sur mon boulot, à force de voir que j'avais été envoyée sur plein de fausses pistes en suivant des conseils donnés par des personnes qui faisaient autorité dans le milieu...
Il y a une sacrée différence entre faire un costume pour une sortie méd et écrire un article sur ce costume. On va pas dire qu'il y a une responsabilité... Mais si, c'est le cas. Les écrits restent, tout ça... Comme je doutais, j'ai préféré demander l'avis d'archéologues, par l'éditeur interposé. Puis j'ai contacté moi même l'archéologue. Et j'ai eu de la chance.
Parce que bien souvent les spécialistes se retrouvent face à un dilemme devant les reconstitueurs :
 dire la vérité ou dire ce que l'autre veut entendre.

J'ai eu une archéologue qui m'a dit la vérité. Elle a eu du bol aussi, puisqu'elle a eu quelqu'un qui voulait vraiment savoir ce que valait le costume présenté et qui ne cherchait pas sa dose de dopamine. Ce qui lui a évité les insultes et railleries auxquelles les spécialistes ont trop souvent droit (le dilemme évoqué plus haut a des raisons d'être...)
Elle m'a expliqué ce qui n'allait pas (ben tout, quoi...)
L'article n'est pas passé, et c'était normal. Puisque basé sur un costume raté. Et mon ego n'a absolument pas été blessé, parce que l'expérience était enrichissante. Un peu déçue quand même, pour le temps perdu à bosser pour rien, tout l'argent dépensé en vain, mais c'est une leçon aussi. Bref, en perdant sur ce coup là, j'avais gagné énormément.

J'ai donc accumulé les lectures, et revu la méthode depuis le début, en repartant sur ce que j'avais appris à faire à la fac : des recherches rigoureuses, et se poser des questions.
J'ai aussi appris à reconnaître, dans le milieu de la reconstitution, les gens sérieux, et ceux qui ne l'étaient pas, ce qui ne fut pas sans de grandes déceptions.

Et depuis, ça va beaucoup mieux, merci. Même si j'ai encore fait des choses qui n'allaient pas (ma robe XIII n°1). Faut du temps quand on reprend tout à zéro. Et la recherche, ce n'est pas facile. C'est drôle, c'est passionnant, mais pas facile. Sinon, ce serait pas drôle !
Et puis maintenant, je peux m'amuser à aller dans des secteurs de recherche universitaire, et à des colloques, congrès et autres joyeusetés...
Le naturel est revenu au galop !

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