lundi 11 avril 2022

COSTUME MEDIEVAL

LES AGITES DU BEAU CALE

Mode masculine, 2.

Manfred, roi de Sicile. Un gars calé, et pas que sur les oiseaux...
 

Rappel de l'épisode précédent : on peut dire coiffe, on peut dire cale, pour désigner ce machin que les messieurs mettent sur la tête et qui se noue sous le menton et dont l'heure de gloire se situe entre 1180, un lundi vers midi et 1400, un mercredi, vers 20h45. 

Attention, on va causer... cale et spermatogénèse ! (Ca, c'est de l'accroche, non ?)

Et avant, une question importante se pose :

Qui porte le cale, ou la cale, ou la coiffe ? 

(Entre le ou la... il semblerait que ce soit plus la, mais, ça va aussi dépendre des possibilités de vannes pourries à faire.) 

Méchant assassin d'évêque...

A priori, ce petit bonnet de lin, ou de soie si c'est la version filet (pour le cuir, je ne me prononcerai pas. Je laisse à d'autres le soin de faire la recherche), sert à protéger les cheveux de la saleté. Bon, déjà, ça ne colle pas trop avec l'option filet. On a vu, avec la version de Montefiascone, que ça sert aussi à empêcher les cheveux de se dresser sur la tête en cas de rencontre impromptue avec des cadavres bavards. 

Rencontre impromptue avec cadavres bavards... Arundel 83, 127, BL
Du coup, ça sert pour les gens qui travaillent, et pour les nobles, voire rois, en goguette. 

Ce qui revient à dire que tous les statuts sont concernés par le port de la cale. Paysans, travailleurs, bourgeois, nobles, très nobles... incluant rois et empereurs. 


 

C'est que les gens du Moyen Âge, surtout au XIIIe siècle d'ailleurs, prenaient soin de leur chevelure. Rappelons que la mode à l'époque est aux cheveux longs, légèrement bouclés, avec une petite frange, le dorelot, et généralement pas de barbe. Les cheveux courts sont réservés au clergé, et aux exclus : prisonniers, galériens. Ca permet de les repérer direct. (Ca en fait, des criminels en cavale en reconstitution, quand même !) 

Lui, il va avoir des problèmes de reproduction...

Bref, ils prennent soin de leurs cheveux, et du coup, on va éviter de les salir, et aussi, ça, faut avoir les cheveux longs pour bien comprendre, on va éviter de les avoir dans les yeux quand on chevauche, d'où le port de la cale chez les chasseurs de la noblesse.

En gros, quand on s'agite, on met un ou une cale. Et souvent, quand on a un certain statut, on met encore un truc par dessus...

Les sources iconographiques sont nombreuses, quels que soient les supports. 

Néanmoins, il en est un qui semble être avare en cale dès qu'il s'agit de la noblesse : la sculpture funéraire. 

Cale de la sculpture funéraire (ou cale à mort)

C'est, je dois dire, un phénomène assez intéressant. Les nobles, rois, etc., sont figurés avec la couronne, ou un chapeau, ou encore une couronne de fleurs et leurs cheveux bien ordonnés. Généralement en tenue clâââsse : cotte longue, et mantel. Le/la cale ferait-iel (pratique l'inclusive, finalement !) désordre en de telles circonstances ? Pourtant, on a bien des représentations sur d'autres supports où le port du mantel et d'une cotte longue n'est pas incompatible avec la/le cale. 

La couronne de fleur, c'est plus classe pour le gisant... Et j'ai de beaux cheveux bien ondulés.
 En revanche, si on prend les plaques funéraires de bourgeois, de docteurs en ceci-cela, d'architectes, c'est une autre histoire. la cale est assez souvent figurée, par exemple à Reims, Châlons-en-Champagne. Ce sont des endroits où l'on croise souvent ce cas de figure, surtout lorsque monsieur est habillé d'une chape, tenue d'extérieur du bourgeois, par opposition au mantel qui serait, en théorie, plus pour le noble. Dans les faits, c'est une autre histoire. 

Coucou monsieur l'architecte !
 L'art, surtout funéraire, fixe une image idéalisée, faisant sens, et usant de stéréotypes. On a déjà eu l'occasion de parler de ces plaques de Châlons, qui semblent bien venir d'un même atelier, limite, fabrication en série, et qui paraissent correspondre à un cahier des charges précis. Bourgeois, doctes personnages, voire petite noblesse, se distinguent, dans la mort, de la noblesse figurée, non en tenue de ville, mais en tenue renvoyant au pouvoir. Quand ce n'est pas une tenue militaire. A ce sujet, on peut cependant mentionner les ordres militaires... On peut trouver, chez les hospitaliers, par exemple, des défunts portant, ou ne portant pas (il semble, mais voir usure de la pierre), le cale. 

Hospitalier a priori sans cale... (mais ça a peut-être mal vieilli)

Hospitalier avec cale

Ceci rend bien évidemment périlleuse toute conclusion tirée des sources funéraires quant au port, ou non, de la cale par la noblesse. Surtout quand on a une ribambelle de nobles, jusqu'aux rois et empereurs, calés, dans les peintures, vitraux, sculptures non funéraires, et autres... 

Balancer des gisants pour prouver que les nobles portaient rarement le cale, c'est nier la nature même de l'art funéraire, et perdre de vue sa fonction. C'est un peu comme utiliser des sceaux, sans considérer que ce sont des images renvoyant un certain statut, utilisant souvent des anachronismes. Sceaux et art funéraires sont, comme les représentations de personnages du passé, des exemples parfaits d'objets devant occasionner un soulèvement de sourcil dubitatif...

Cale endrier

Autre type d'oeuvres à risque : les calendriers. Là aussi, on est dans des univers stéréotypés. Mais aussi proportionnellement trompeurs. Les activités des mois figurées dans les calendriers médiévaux concernent surtout les travaux de la terre. Proportionnellement, on va trouver bien plus de paysans que de nobles. On en a... En train de se préparer à la drague, ou partant à la chasse. Il y a 12 mois. Combien de fois croise-t-on des nobles ? Les jeunes gens en mode séduction sont représentés à leur avantage, cheveux coiffés d'une couronne de fleur, et pas avec coiffe. Hop, ça en moins. 

Quant aux scènes de fauconnerie, là aussi, la cale manque, alors qu'on peut trouver des chapeaux et des bonnets. Et pendant ce temps, d'autres thèmes, plus récents, et du coup, peut-être plus modernes dans certains aspects, comme le Dit des Trois Morts et des Trois Vifs, montrent régulièrement des fauconniers calés. 

Même les morts en ont... avec des couronnes... Eh oui, même la haute noblesse succombe -c'est le cas de le dire ici- à la mode de la cale. Ceci dit, ils sont pas trop en tenue de sortie, mais bien en tenue de roi. Ce qui indique que le cale n'est pas incompatible avec la royauté (on en a vus assez d'exemples !) (photo Sailko, Wiki Commons)
D'autre part, si l'on regarde certains paysans... On remarque que leur caractère vulgaire n'est pas signifié par la coiffe proprement dite, mais par l'état de cette coiffe : pleine de trous, avec les cheveux en pagaille qui dépassent. 

La cale est un moyen de discipliner la chevelure (ceux qui ont des cheveux longs peuvent comprendre). La chevelure soignée, une marque de statut. L'absence de cale sur les images renforce la noblesse du personnage, opposé au pécore qui a besoin d'une cale, et même, parfois... ça n'aide pas. Le cale n'est pas l'apanage du paysan ou du travailleur. Cela protège les cheveux (je radote). Cela empêche les cheveux de tomber sur le visage, problème qu'ont aussi bien les paysans aux champs que les nobles à la chasse. Bref, c'est valable pour tout le monde. 

Même les rois portent la cale sous le chapeau ou la couronne. Ca montre qu'on prend soin de soi. De ses cheveux, et aussi... Bon... On revient sur Aldebrandin de Sienne ?  

Mais pourquoi donc, tout d'un coup, on couvre sa tête ?

Théorie fumeuse... Ou plutôt humide ?

Attention, ça va pas être triste. 

Rassurez-vous, c'est pour la bonne cause et ils sont mariés ! Sloane 2435, 9v, BL
 Dans un de ses articles, Michael Camille, l'un des grands spécialistes de l'image médiévale, mentionne la représentation d'une scène de rencontre entre monsieur et madame dans le Régime du Corps d'Aldébrandin de Sienne, médecin du XIIIe siècle. Cette image m'a valu un zapping, le jour de mon anniversaire... J'en rigole encore ! 

Il nous racontait quoi, Michael (hypothèse reprise par Gil Bartholeyns) ? 

Asseyez-vous, buvez un coup. Ca va ? Vous êtes bien installé ? On y va. Déjà, le texte d'Aldo : 

"Cascuns ki a sens et discretion doit metre sen entention et tout son pooir de savoir comment on doit habiter a feme, pour chou que c'est une principaux cose dou cors sainnement maintenir et dou cors metre a nient ki tempreement ne le fait et use". (correcteur google, RIP).

En clair, en version française : Celui qui a sens et discernement devrait dévouer sa compréhension et tous ses efforts à apprendre comment on peut cohabiter avec une femme, car c'est une des causes principales pour se maintenir en bonne santé, et celui qui ne le fait pas modérément a un corps qui n'est bon à rien.

Cale ifourchon

En gros : faire des galipettes, ça maintient en bonne santé, mais faut pas trop en abuser.

A ce moment là, vous vous demandez quel est le rapport avec la choucroute, ou du moins la cale. Et je vous comprends. 

Mais quel est le rapport avec la choucroute ? Cette histoire est très capillotractée !
Le but, c'est faire des enfants, de la meilleure manière possible. L'image impliquée ne concerne pas les joies des galipettes. Camille se réfère aux traditions médicales antiques... Aristote, Galien, par exemple (on causera d'Hippocrate un peu plus tard, ça va éclairer). En gros, le sperme se fait dans tout le corps, ça bouillonne de partout avant d'arriver là où ça arrive (je résume à grosses louches). Mais, surtout, ça part... du cerveau avant d'arriver dans les roubignoles (Les étudiants en médecine, notez pour votre examen, ça vous aidera...).

Cale orie : Un grand moment de médecine

 Comme je suis de nature curieuse, j'ai un peu poussé les explorations hors de l'article de Camille. En gros, effectivement, la tête joue un rôle. Je vous mets ce passage qui vient d'Hippocrate (sachant qu'Aristote diffère un peu des théories d'Hippo...) (Extrait du livre IV, 2.)

"Ceux qui ont subi des incisions à côté des oreilles usent, il est vrai, du coït, et éjaculent, mais leur éjaculation est peu abondante, inactive et inféconde ; car la plus grande partie du sperme descend de la tête, le long des oreilles, à la moelle épinière; or, cette voie est fermée par la cicatrice qui suit l'incision (Des Eaux, des Airs et des Lieux, § 22)."

J'ai choisi ce passage, parce qu'on voit le rôle joué par la tête, au niveau des oreilles, dans la diffusion du sperme à partir du cerveau (vous continuez de noter, les étudiants en médecine). Le chemin est le suivant : cerveau, derrière les oreilles, moelle, reins, roubignoles, zigounette, madame, et on laisse reposer 9 mois. Ceci s'appelle un raccourci.

Autre idée importante qui apparaît chez plusieurs auteurs antiques : l'importance de la chaleur. Le principe mâle est chaud. Et le sperme est lié à la chaleur (vous notez toujours ! Je voudrais pas que vous ratiez vos examens !)

Un chaud et une froide
 Ok, mais la cale ? J'y viens ! Auparavant, petit rappel historique :

A partir des Croisades, et aussi la multiplication des contacts avec l'Orient par le commerce, la Reconquista, la récupération de la Sicile et autres choses du même genre, les textes originaux antiques sont de plus en plus accessibles en Occident. En particulier les textes médicaux. Avec en plus d'autres nouvelles interventions, comme celle d'Avicenne. Et donc, les trucs hyper scientifiques concernant la procréation, qui est le devoir de chaque bon chrétien sauf s'il est plus dans le trip religieux. Et ces ouvrages antiques et les travaux de médecins arabes font référence. Autorité. Voir, par exemple, le pouvoir du nom d'Aristote dans le Nom de la Rose, qui en est une excellente expression. 

Si ça vient d'Aristote (ou de tout autre figure d'autorité made in antiquité), c'est tout de suite plus sérieux...
 Du coup, ces textes antiques vont être repris, et il paraît même que ça va pourrir la médecine jusqu'aux XVIIe-XVIIIe siècle. 

Après ce petit intermède, je reviens à Camille, et à la cale, coiffe... C'est au choix. 

Sortez couvert !

Camille rappelle qu'il est important qu'il n'y ait pas déperdition de chaleur (une idée vraiment importante dans les textes antiques que j'ai zyeutés avant de me lancer dans ce modeste article) lors de l'acte. La perte de chaleur mettant monsieur en danger (et puis, des fois que ça donne une fille, ce serait le pompon !). Donc, pour que tout se passe bien pendant les galipettes et augmenter les chances d'avoir un individu du bon sexe... On se couvre la tête (madame aussi) pour tenir au chaud les veines passant dans le coin des oreilles (voir le passage d'Hippocrate suscité pour piger le problème).

L'enlu du Sloane 2435 illustre la procréation, sans plaisir, dans les meilleures conditions. En indiquant même à quel moment de la digestion ça va le mieux marcher, etc. Pour plus de détails, voir l'article de Camille en entier. Et toute la littérature antique (de beaux moments de misogynie) et médiévale sur la question. (Pour Camille, ça se trouve dans Constructing Medieval Sexuality, Uni du Minnesota, 1997).

 C'est marrant, en tout cas, de noter que la manie de porter des trucs sur la tête, et en particulier le cale, coïncide, chez les chrétiens, avec l'arrivée de ces théories médicales... Et puis, des trucs fourrés. Comme par hasard !

En gros, si on suit l'hypothèse de Camille, la coiffe garde la partie de la tête où le sperme va transiter entre cerveau et moelle bien au chaud, ce qui donne un sperme de meilleure qualité. Et le bonnet de nuit, c'est pas que pour éviter un rhube.

Donc, le cale est un accessoire vachement important, et c'est bien pour ça qu'il faut le mettre ! Sortez couvert si vous voulez avoir des enfants ! (Maintenant, c'est plutôt sortez couvert si vous ne voulez pas avoir d'enfants.)

Les oreilles bien dégagées, le pire anachronisme au XIIIe ?

L'utilité de la cale en cette période de renouvellement de la médecine ayant été abordée, on comprend peut-être mieux sa forte présence parmi les accessoires du costume. Et aussi l'importance de garder la tête au chaud. Surtout autour des oreilles ! 

Mulet impérial ? Non, cheveux ramenés derrière les oreilles.
Certes, il est vrai que les images ne montrent pas toujours des nobles très calés... Mais ils ont malgré tout le secteur des oreilles couverts par les cheveux... Il devient intéressant de considérer, en plus des têtes calées, celles où les cheveux sont sur les oreilles, pour bien saisir l'impact de ces idées médicales sur la mentalité. Les oreilles bien dégagées, c'est pas XIIIe du tout ! C'est juste la marque de l'incompréhension totale d'une période. Et du coup, je m'interroge... On fait quoi de la coupe mulet ? Ah ben, on en trouve un peu, si, si... Mais l'arrière des oreilles est bien couvert. La descendance est sauvée !

Coupe presque mulet médiévale, début XIVe, tout est dans les petites mèches sur les tempes. Ca tient chaud. Et surtout, ça tient chaud derrière les oreilles. Ouf !

Ceci dit... Cela met le doigt sur un point majeur : pour comprendre le costume médiéval, on ne se contente pas de regarder des images, ou de lire des livres sur le costume. C'est tout une mentalité dont il faut s'imprégner. Qu'il faut comprendre, et étudier. 

Et puis... Il y a les textes d'époque !

Cale pin : la cale ou coiffe dans les textes

On ne le répètera jamais assez, les textes (même ceux des auteurs grecs) sont des sources majeures pour comprendre une civilisation, et donc son rapport au corps et au vêtement. 

On se jette sur la littérature, mais aussi sur les textes genre inventaires, comptes, etc. Genre, la liste de courses de Charles d'Anjou. 

"i piece de tele deliée pour faire coiffes"

Vu le contexte autour (commande de heuses, chausses pour monter à cheval), on peut se dire que c'est pour homme.

"v dozenes de coifes à mestier de pluseurs couleurs"

Là, énigme... difficile de dire si c'est pour homme ou pour femme. On est plus dans la partie des commandes pour la reine. En outre... coiffe à métier ? Personnellement, j'hésite entre le filet à cheveux (version homme ou version femme ?) ou la bribri avec une petite broderie entre les 2 parties. Précautions quant à cette partie. Il en reste la commande pour coiffes probablement masculines au dessus, faites depuis Naples, à Paris.

Après cette source très connue (qui mérite de l'être), allons voir chez un auteur confidentiel, surtout pour le XIIIe, un illustre inconnu, Jean de Joinville, dans sa bio d'un personnage historique totalement anecdotique, Saint Louis.

Notez au passage la grosse broche, de type liturgique, qui va très bien avec la tenue cérémonielle, inspirée de la liturgie... Le manteau ainsi fermé renvoie à... la liturgie. On est loin du mantel XIIIe. Ce type d'image figure aussi sur les sceaux... Très codifié, et non représentatif du costume quotidien.
Ca cause de coiffe. Joinville, bonne noblesse française, parle de ses coiffes, à lui. Pour lui... et pour le personnage anecdotique :

§ 60 (extrait) ... mout bien peigniez et sans coife et un chapel de paon blanc...

On en revient à l'obsession de la noblesse pour les cheveux bien peignés, qu'on retrouve sur les gisants. Et, surtout, la précision du "sans coiffe" est parlante. Si Joinville, des années après, se souvient de cette apparition du roi sans coiffe et insiste dessus, c'est peut-être pour en souligner le caractère exceptionnel (et vanter la qualité de la chevelure royale, tellement belle qu'on n'a pas à la cacher) ? 

On apprend aussi chez Joinville que "la Quoife Dieu" est le juron préféré du comte de Soissons ! C'est du joli, tiens ! 

Joinville reçoit également quelques coiffes blanches à Acre... Où il se fait très bien coiffer (vraiment important, le fait d'être bien coiffé, on dirait).

La cale de la noblesse semble se distinguer par quelques broderies, que l'on devine par exemple sur la cale portée par le roi Manfred de Sicile, ou dans d'autres enluminures du De arte Venandi cum Avibus. Il s'agit de broderies discrètes. Signalons au passage le nombre impressionnant de coiffes visibles dans le manuscrit, aussi bien chez le petit personnel que chez les nobles... 

Cale embredaine

Ces broderies discrètes sont contrebalancées par celles qui ornent le "bonnet" protégeant les cheveux du héros du conte Helmbrecht le Fermier : éperviers, colombes, une vraie volière ! Sans oublier les scènes de la guerre de Troie et des aventures de Charlemagne, ou encore liées à Attila, et le célèbre Jean Passédémeyeur. Il s'agit, dans ce conte, d'un jeune paysan ne voulant pas rester à sa place et souhaitant imiter les habitudes des nobles... En n'en comprenant pas les codes. Abus de broderies, de boutons. Bref, il est ridicule en voulant passer pour ce qu'il n'est pas. Et ça finit mal. Le bonnet pourrait être, là encore, une cale, ou un cale, ou une coiffe. Les objets de tête brodés étant rarissimes à cette époque chez les laïcs, cela paraît être l'option la plus raisonnable. Surtout qu'il y est question d'un liseré courant sur le front d'une oreille à l'autre, d'une décoration suivant la raie de la chevelure, de broderies derrière les oreilles entre les aiguillettes (cordons ?). Il semble bien que notre Helmbrecht a voulu imiter les habitudes de la noblesse, à savoir une coiffe ornée, avec classe et distinction. Mais il manquait de classe et de distinction et est donc parti dans le tape-à-l'oeil. 

Du meilleur goût sur une cale...
Cale feutrée

La cale, ou ce que vous voulez, est bien une coiffe très répandue au XIIIe siècle. Elle est un incontournable de la garde-robe, et ce même chez les plus hauts statuts. L'importance de la chevelure, soulignée par Joinville, de la noblesse pourrait expliquer que, dans l'art funéraire, on préfère montrer ce signe de qualité, plutôt que la coiffe. Les traces écrites indiquent, en revanche, que la noblesse portait la coiffe, tout autant que les travailleurs et les bourgeois. Et, lorsque l'on sort des arts emplis de stéréotypes, comme l'art funéraire ou les calendriers, les nobles avec cales ne sont pas rares, y compris chez les plus grands, comme l'Empereur. 

Signalons enfin un dernier point concernant la cale. On sait que l'homme chrétien est supposé prier tête nue. En regardant un peu mes sources, je me suis rendu compte que le port de la cale faisait souvent exception à partir de la 2de moitié du XIIIe. Visiblement, on peut garder la coiffe pour prier, contrairement à ce que je croyais... 

Ca compte pas ?
Finalement, ce petit accessoire si commun, porté par le plus humble comme le plus puissant, fait couler beaucoup d'encre, et pose pas mal de question... 

Et le chapeau en prime ? Les traditions se perdent !

 


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