Une histoire de manches
Roi Mage, st Julien du Sault, milieu XIIIe |
Dans mon livre sur le costume au XIIIe siècle, j'ai abordé la
question importante des manches flottantes, ou manches à plis tuyaux
d'orgue. Un phénomène majeur de la mode de cette époque, qu'il
était impossible de passer sous silence, ou de minimiser, puisqu'il
est récurrent sur les tenues d'extérieur, de ville ou de voyage, et
fait partie des vêtements des notables. On en trouve toujours des
traces sur les tenues des juges et des avocats.
La Reine Emma fuit l'Angleterre, Matthew Paris, vie d'Edward le Confesseur, vers 1230-1240, Cambridge University Library, Ee.3.59, fol. 4r, Wikimedia commons |
Or le « patron » proposé p. 153 n'est pas parfait (je
pense que cela n'a échappé à personne). En réalité ce n'est pas
un patron : il présente la manche une fois plissée, et mise
en forme, avant l'assemblage et pas la forme à couper.
(Parfois, il y a des choses qui me
paraissent évidentes... Mais qu'il faudrait que je précise... Je
sais...)
Couronnement d'Edith, Matthew Paris, vie d'Edward le Confesseur, Cambridge University Library, Ee.3.59, fo. 11v, Wikimedia commons |
En
gros... La manche doit être plus large que haute (et pourtant,
certaines sont déjà très longues!), ce qui est d'ailleurs indiqué
dans le livre, puisqu'il est écrit « compter
150 cm de large »
sur la hauteur de la manche. Cette remarque étant d'ailleurs en
totale contradiction avec le dessin, si on considère le dessin comme
un patron...
Détail de la plaque funéraire d'Hugues Libergier, mort en 1263. Cathédrale de Reims |
En
réalité, c'est donc un
croquis de la manche avant assemblage et non un patron.
Et j'aurais dû corriger avant impression... Ce sont les « joies »
des publications, sur lesquelles on ne peut plus revenir, d'où
l'intérêt d'un blog, qui permet d'apporter quelques corrections.
Le texte présente cependant plusieurs avertissements :
« Proposition
pour les manches flottantes des chapes de notables et de nobles.
Hypothèse.
Non
testé en grandeur nature.
Faire
des essais avant de passer à la réalisation. »
Ces
avertissements restent valides puisque les ampleurs et longueurs
changent selon les statuts.
Détail de l'histoire du drapier fraudeur, cathédrale de Reims, 2e quart du XIIIe siècle |
C'est un détail de vêtement qui demande beaucoup de
soin. N'oublions jamais l'intérêt que les gens du XIIIe siècle
avaient pour les manches.
Donc, faites énormément d'essais, regardez bien les
sources. Surtout celles qui savent préciser des détails qu'on ne
voit que trop rarement et qui donnent une multitude d'infos sur ce
qu'il faut faire, et ne pas faire.
Détail de l'histoire du drapier fraudeur, cathédrale de Reims, 2e quart du XIIIe siècle |
En fait, j'hésite encore entre plusieurs possibilités,
pour la forme finale, surtout après avoir vu certaines sources de
près. Et sur la manière dont s'articulent la manche et le corps. Il
y a d'ailleurs sûrement plusieurs formes possibles, et plusieurs
manières de monter cette manche, selon les époques, les statuts et
les usages.
En outre, je préfère avoir toutes les données en main
avant de me lancer dans une réalisation qui demande quand même pas
mal de boulot. Or, l'une des œuvres les plus précises quant à la
manière dont sont construites ces manches n'est pas particulièrement
accessible. Il faut des autorisations, se déplacer, etc. Mais avant
cela, il fallait la repérer ! Et forcément ce n'est arrivé
qu'après la parution du livre.
Un jour, je redessinerai tout ça, en patron, et en
aspect final, en tenant compte des différentes possibilités. Un jour, je redessinerai tout ça... Oh oui.
Et sinon, il y a des options en apparence plus simples...
Le Tentateur de la cathédrale de Strasbourg, Musée de l'oeuvre Notre-Dame, Strasbourg, vers 1280. |
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