POUVOIR CONTEXTUALISER POUR ETUDIER LE COSTUME
Un bien regrettable article
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Apocalypse de Trinity College, vers 1250, Cambridge, TC Library, R. 16.2, 30v, Saint Jean et le jeune brigand. (Photo, Trinity College Library) |
Lorsqu'un article est publié, l'auteur risque forcément de recevoir des critiques. C'est la règle, et c'est parfaitement autorisé. Surtout si les critiques sont justifiées. Et pour une fois, on va très vite laisser de côté les plaisanteries habituelles. Parce que c'est sérieux, là. (Quoi que, les autres articles sont sérieux, mais, pas dans le ton.)
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Ecouter le Tribunal des Flagrants Délires tout en travaillant = gros fous-rires = inattention = lapsus. C'est la faute à Desproges... (photo site internet Chef Simon) |
Tout le monde fait des erreurs. Et je ne fais pas exception. Lapsus hilarants, inattention, confusion... Document inconnu qui est connu plus tard (on ne peut pas tout connaître, même si on fait attention). Etc. Cela fait partie du jeu. Je l'accepte, et j'essaie de tenir compte des boulettes pour ne pas les réitérer (au moins dans l'année !). Autant dire que les erreurs sont bien plus courantes qu'on ne le croit, et, avec l'expérience, on en trouve même chez de grands spécialistes (l'inattention, quand on écrit beaucoup, c'est courant, surtout si on est fatigué, qu'on a tellement écrit sur un sujet qu'on n'a pas le courage de relire, pas bien, ou qu'on relit, mais qu'on ne voit plus les fautes, parce qu'on n'en peut plus de ce texte !). C'est humain. C'est pour cela qu'un avis extérieur est toujours le bienvenu.
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Exultet de Monte Cassino, Monte Cassino, vers 1075, Ecclesia et Tellus, détail : Ecclesia, Londres, British Library, Additional 30337, 3 (Photo BL) |
Là où cela devient problématique, c'est quand il y a une accumulation en tout genre sur seulement quelques pages, qu'on a l'impression d'être au resto d'Ikea, et que cela concerne surtout un domaine précis de la recherche. Il y a des erreurs qui peuvent être énormes (j'en ai à mon actif, à mon grand dam, mais je prends la chose avec philosophie et humour. Je n'avais qu'à faire plus attention), mais qui, au final, n'impactent pas trop les conclusions ou la méthode. Il y en a d'autres, répétées, qui montrent un problème de maîtrise de certains secteurs, qui vont jouer sur ces conclusions et rendre caduque la valeur de la recherche.
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Collectar d'Ottobeuren, Allemagne, dernier quart du XIIe siècle, Adoration des Mages, Londres, British Library, Yates Thompson 2, 62v (Photo BL) |
Bref, là, cela touche à l'image médiévale et au costume XIIIe. Je répète, c'est un article publié, donc, toute critique est possible. Si les remarques faites sont de la mauvaise foi ou de la calomnie, cela sera facile à démontrer, et relèvera du dénigrement. Mais ce ne sera pas le cas ici, on va faire dans le factuel et laisser l'émotionnel de côté.
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Chut ! Souvenir de vacances studieuses... (Référence omise volontairement) |
Pourquoi l'article est-il mauvais ?
Il y a, comme nous le verrons, de nombreuses erreurs. En matière d'iconographie médiévale. En matière d'histoire du costume. En matière de culture biblique. En matière d'histoire de l'art médiéval. On trouve aussi des problèmes bibliographiques. On passera sur quelques fautes de style et d'orthographe... Il en ressort un sentiment d'absence de maîtrise des sources, ce qui nuit forcément à la contextualisation. Or, cette contextualisation est un travail fondamental en histoire du costume, en histoire de l'art, en histoire en général.
Bibliographie
1er point, qu'on va vite régler... C'est le moins gênant de ceux que nous allons aborder. Mais cela pose quand même problème. Les références bibliographiques. Lorsque l'on parle d'un auteur, on prend la peine de citer le nom sous lequel il publie. Or, il se trouve que je suis citée dans l'article, avec l'initiale M. Qui correspond à mon prénom état-civil, mais pas mon prénom usuel, sous lequel je publie. C'est Tina. Cela peut prêter à confusion. M. Anderlini publie sur les atomes dans des revues comme Nature. T. Anderlini publie sur le costume médiéval et l'art dans des revues comme Medieval Costume and Textiles ou Moyen Âge. Et il y a aussi M. Anderlini qui publie sur l'égyptologie, et encore un M. Anderlini qui publie sur la musique, et le M. Anderlini qui est plus dans les sciences politiques.
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Les chats, l'Egypte... C'est donc de famille... Ouvrage de M. Anderlini |
Autre point concernant la bibliographie... le livre d'Enlart, que l'auteur de l'article n'aime pas. Il est cependant cité régulièrement, encore récemment, par des spécialistes de renom et dans des thèses de doctorat (par exemple, celle d'Elodie Gidoin-Barale, en 2019. On le trouve aussi, comme référence, dans l'histoire du costume sous la direction de Denis Bruna, parue en 2019, et encore par Sarah-Grace Heller ou Monica Wright). Certaines parties du livre d'Enlart sont datées, certes. Mais d'autres restent très précieuses. Il suffit pour cela de savoir quoi garder. J'avais d'ailleurs fait une note comportant des réserves dans mon livre.
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C'est pas vrai, et j'en connais certains personnellement... (google image) |
Auteurs anonymes ? Pas tant que ça.
Deuxième point sur lequel je vais vite passer. Il arrive qu'on connaisse les noms de certains sculpteurs médiévaux, ou qu'on leur ai donné un surnom. Le Maître de Naumbourg, auquel on attribue le gisant de Mayence et Maître Radovan, le sculpteur croate de Trogir (identifié) méritent qu'on les mentionne. Surtout que, selon certains chercheurs, Voir cet article un peu ancien, la carrière de Maître Radovan peut expliquer certaines particularités de son oeuvre. Ce qui aurait permis de contextualiser et de faire des rapprochements intéressants. Il en va de même pour le Maître de Naumbourg.
de l'université de Cambridge ou du Maître de Sarum pour l'Apocalypse de la BNF, cité sur la base Mandragore.Après, reconnaissons que c'est loin d'être le plus ennuyeux vu ce qui va suivre.
Questions religieusesIl y a de réels problèmes en ce qui concerne l'iconographie médiévale et la culture biblique. La religion, ou l'athéisme, des auteurs n'entre pas en ligne de compte quand on étudie l'art médiéval. Il y a des catholiques pratiquants, moins pratiquants, des protestants, des juifs, des athées convaincus, des agnostiques, et des croyants de temps en temps. Ces différences peuvent expliquer certaines idées et certains intérêts, cela est vrai, mais il faut rester aussi objectif que possible. Il est pourtant majeur d'avoir un minimum de notions sur la religion, les personnages, les ouvrages, les histoires, afin de comprendre les oeuvres et les mentalités. Envisagerait-on d'étudier l'égyptologie sans avoir la moindre connaissance de la religion égyptienne, surtout si on examine des oeuvres à caractère religieux (la grande majorité de ce qu'il nous reste de l'Egypte pharaonique) ? Evidemment que non. Or, on remarque de plus en plus souvent des lacunes en ce qui concerne la religion chrétienne en histoire médiévale comme en histoire de l'art médiéval. Ce qui est plus que fâcheux quand on travaille avec des oeuvres religieuses. Hélas, cet article comporte régulièrement des erreurs au niveau de l'analyse iconographique, de l'identification des scènes, de la connaissance des différents textes bibliques.
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Peut aider quand on ne sait pas ce qui se passe dans les images religieuses. Avec d'autres ouvrages, déjà conseillés ailleurs sur le blog. |
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Maître Radovan, activités des mois, la taille, achevé en 1240, Trogir, cathédrale St Laurent. (wikimedia commons) |
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Benedetto Antelami ou atelier, le mois de décembre (la taille) et le signe du capricorne, qu'on devine en dessous, 1er tiers du XIIIe siècle. Baptistère de Parme (Photo personnelle) |
Maître Radovan, le mois de mars, Cathédrale de Trogir (Wikimedia Commons) |
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Archivolte des mois, Mars, années 1230, Basilique Saint Marc, Venise. (Photo personnelle) |
Maître Radovan, Février ?, Cathédrale de Trogir (Wikimedia Commons) |
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Reconstitution d'un fauteuil romain en osier, Museum of London. A comparer avec le fauteuil précédent. (Photo personnelle) |
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Bréviaire, France, Paris, 1285-1297 MS M.1042 fol. 2r, Février. NY, Pierpont Morgan Library (photo PM Library) |
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Bréviaire, France, Paris, 1285-1297 MS M.1042 fol. 2v, Mars. NY, Pierpont Morgan Library (photo PM Library) |
Une dernière chose concernant ce surcot, qui nous ramène à la question de la fiabilité des calendriers. Il semble, si on le compare à d'autres représentations, qu'il corresponde à un type de vêtement aisé (encolure, boutons, etc.) visible sur des personnages de la noblesse.
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Gisant de Philippe de France, frère cadet de Saint Louis (mort en 1235), Basilique de Saint-Denis (Photo personnelle) |
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Psautier de Lambert le Bègue, Février. Vers 1255-1265, Londres British Library, Ms Add. 21114, 1v (photo BL). Le paysan taillant porte une cotte en soie, d'après sa décoration. |
"Marie".
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L'Eglise Triomphante, carnet de Villard de Honnecourt, Paris, Bibliothèque Nationale de France, français 19993, 4v (Photo BNF) |
Déjà, précision en passant. La tunique de sainte Claire présentée comme un surcot dans le texte de l'article est bien une cotte. C'est celle de sainte Elisabeth qui est un surcot... Mais bon, l'erreur est pardonnable. Les petites confusions de ce genre sont courantes.
Pour la "sainte Marie"... Le f. 4v (ou f. 8) des carnets n'est pas Marie, mais l'Eglise. Ecclesia. site BNF, aller à folio 8, noté Eglise Triomphante
On peut assimiler la Vierge à l'Eglise, mais, néanmoins, on fait clairement la distinction entre la Vierge en tant qu'Eglise et Ecclesia, figure triomphante, portant couronne, drapeau et calice, généralement opposée à la Synagogue, yeux bandés, étendard brisé, couronne tombant ou au sol, et tenant les tables de la loi. Il s'agit d'une représentation courante dans l'art chrétien, et facilement identifiable.
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Benedetto Antelami, Déposition, Détail : Marie et Ecclesia, vers 1178, Parme, Cathédrale (Photo personnelle) On retrouve une tenue similaire à l'Ecclesia de Villard. |
Un autre problème est notable au sujet du dessin de Villard. La tenue que porte Ecclesia, chez Villard, est décrite dans l'article comme un surcot à manches 3/4. Pour contextualiser une oeuvre, il est important de savoir la placer chronologiquement, pour voir ce qu'elle apporte de neuf, ou pas. Il est donc primordial d'avoir une idée de ce qui précède, et même de ce qui suit. Travailler sur le costume XIIIe en négligeant le costume XIIe ou le costume XIe, c'est risquer de manquer des détails importants, comme les tenues archaïsantes. Or, ce "surcot" n'en est pas un.
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Maître du Registrum Gregorii, Registrum Gregorii de Trèves, Otton II entouré des provinces de l'Empire, fin Xe siècle. Chantilly, Musée Condé, Ms 14bis. (Wikimedia Commons) |
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Plaque funéraire de la Reine Frédégonde (545-597), vers 1160, Basilique de Saint-Denis (Photo personnelle) |
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Autel portatif aux vertus cardinales, Force et Justice, Cologne, vers 1150-1160. Berlin, Kunstgewerbemuseum (Photo personnelle) |
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Ecclesia, du portail sud de la cathédrale de Strasbourg, vers 1220. Strasbourg, Musée de l'oeuvre Notre-Dame (Photo personnelle). Tenue actualisée. Le gros fermail renvoie aux fermaux religieux. |
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Maître de l'abbé Erminold, Vierge de Ratisbonne, vers 1290, Nüremberg, Germanisches Nationalmuseum. (Photo personnelle) |
Par ailleurs, on note souvent, dans les sources écrites et iconographiques, la présence de surcots féminins, et ce même avant 1200. Il ne faut pas oublier que le surcot peut avoir des manches... Ce qui est précisé dans certaines sources écrites. Pour les sources iconographiques, on peut se référer au manuscrit du Liber ad Honorem Augusti, présentant des surcots sans manches à la fin du XIIe siècle.
Le Psautier Rutland (British Library, Add Ms 62925)
"Deux manuscrits anglais nous montrent également des ceintures sur surcots dans des contextes peu précis : le Psautier de Rutland et l'Apocalypse dite du Trinity College (sic), tous deux datant du milieu du XIIIe siècle. A l'heure actuelle, ces sources ne peuvent être analysées avec suffisamment de précision pour pouvoir définir le contexte d'utilisation des ceintures sur surcots qu'elles représentent."
Pour l'instant, intéressons-nous au cas du Psautier Rutland.
"Contextes peu précis". Les deux scènes choisies par l'auteur sont légendées ainsi : "Roi trônant au milieu de sa cour" et "Roi rendant la justice".
Les scènes qu'on trouve dans les psautiers, même quand elles paraissent innocentes, sont souvent à mettre en relation avec le psaume correspondant. Ce rapport n'est pas toujours évident, mais il existe. Par ailleurs, selon certaines traditions, parmi les auteurs des psaumes se trouve un personnage très célèbre : le roi David. Ce qui explique sa présence fréquente dans les psautiers. Ces deux scènes présentées par l'auteur de l'article comme ayant un vague rapport avec la féodalité (on pourrait l'entendre ainsi) sont en réalité deux scènes très communes de la vie du roi David. Et figurent d'ailleurs dans un ouvrage très utilisé quand on travaille sur le costume médiéval du XIIIe, la Bible de Maciejowski conservée à la Pierpont Morgan Library de New York. La similitude de thème aurait pu être notée ou l'image de Maciejowski utilisée pour identifier celle de Rutland.
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Bible de Maciejowski, Onction de David, Paris, France, ca. 1244–1254, New York, Pierpont Morgan Library, MS M.638, fol. 36r (détail). (Photo PM Library) |
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Psautier Rutland, Couronnement et onction de David, vers 1260, Londres, British Library, Ms Add. 62925, 29r (Photo British Library) |
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Psautier Glazier, Couronnement de David, Londres, ca. 1225, New York, Pierpont Morgan Library, MS G.25 fol. 4r (Photo PM Library) |
Il conviendrait de rapprocher cette illustration avec le Couronnement de David du Psautier Glazier, de la Pierpont Morgan Library (Ms G25, vers 1225), à la fois proche et très différente (celle de NY omettant l'onction). Les liens paraissent réels, mais les différences sont à mettre en rapport avec un contexte historique autre. Il y a suffisamment d'indications dans la page de la BL pour commencer une petite enquête passionnante permettant de préciser un contexte historique, autour du psautier Rutland et de la famille commanditaire pour entrer dans l'histoire du XIIIe siècle anglais, et comprendre les portées politiques du manuscrit. (Mais ceci est une autre histoire).
Comme je l'ai indiqué précédemment, je travaille sur la question des ceintures sur surcot depuis plus de 5 ans (par intermittence... Mais, ça a déjà une bonne forme), et, je préfère garder mes interprétations pour une communication. Néanmoins, je peux dire que rien n'est surprenant et tout s'inscrit dans une logique d'ensemble. Il suffit de savoir déterminer les contextes. Très facile ici. La mise en scène de l'image correspond d'autre part à de multiples représentations de couronnements dans l'enluminure anglaise, qu'il s'agisse de rois bibliques ou historiques, dont certaines paraissent inspirées de Glazier et/ou Rutland.
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Psautier Rutland, Folie de Saül, vers 1260, Londres, British Library, Ms Add. 62925, 55r (Photo British Library) |
Ce roi rendant la justice, selon l'auteur de l'article, est en fait l'incarnation du mauvais souverain, victime de la folie et de la jalousie, et désirant tuer David. Bref, il s'agit de l'injustice, ce qui est renforcé par l'image du folio suivant (55v) figurant un roi difforme assassinant un prêtre (Saül tuant Ahimelech, alors qu'en fait Saül n'a fait "que" ordonner la mort des prêtres, l'exécutant étant Doeg).
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Bible de Maciejowski, Saül voulant tuer David (Folie de Saül), Paris, France, ca. 1244–1254, New York, Pierpont Morgan Library, MS M.638, fol. 29r (détail). (Photo PM Library) |
La légende du "roi rendant la justice" est bel et bien une lecture totalement erronée de la scène (qui est donc dans Maciejowski, cette bible apparaissant plus être traitée comme une banque d'image que comme un manuscrit ayant un sens et racontant des histoires...).
Là encore, cette image du Psautier Rutland peut être rapprochée du contexte politique et familial des commanditaires, et complète même l'onction de David.
Apocalypses
Commençons par celle de Trinity College. consulter les fichiers (cliquer sur open in universal viewer pour en voir la totalité)
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Apocalypse de Trinity College, vers 1250, Cambridge, TC Library, R. 16.2, 1. Saint Jean devant l'empereur Domitien. (Photo, Trinity College Library) |
Un autre surcot ceinturé apparait f. 30v. Ici sur un jeune chasseur, lui aussi court vêtu. Nous sommes donc encore devant un personnage pratiquant une activité. La ceinture, plus large et plus courte que de coutume, se trouve avoir ici une utilisation correspondant à l'activité pratiquée : elle permet d'y passer des flèches.
Passons à l'Apocalypse de la BNF, Ms Français 403, f. 7v, attribuée au Maître de Sarum.
"Roi David en train de chasser" (sic)
Le roi David est cité 3 fois dans l'Apocalypse, dont 2 pour préciser que le Christ en est le descendant. Il n'agit pas. Certes, l'Apocalypse de Trinity College montre qu'on peut ajouter des scènes de la vie de saint Jean à un manuscrit. Saint Jean, s'il connaissait bien le descendant du roi, n'a jamais rencontré David personnellement, ou en vision. Avec ce folio, nous sommes au coeur même de la vision de saint Jean.
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page du site de la BNF. Ouverture du Premier Sceau. |
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f. 9. Quatrième Sceau (Photo BNF) |
Bible Moralisée de Vienne, 1179.
Pour en savoir plus sur ce qu'est une Bible moralisée, Article d'Aline Debert du CNRS
(On peut relever, dans cet article un petit lapsus, à un moment, la cote du manuscrit est 1779 au lieu de 1179. Une erreur déjà relevée, de manière récurrente, dans un livre excellent. Comme quoi, les lapsus sont monnaie courante, et sont souvent sans conséquence sur le fond d'une publication. En revanche, lapsus, confusions dues à la fatigue, petits oublis, fautes d'orthographe, etc. apparaissent comme des os à ronger pour les rageux, qui en font leurs choux gras, étant incapable de s'attaquer au fond ou à la méthode.)
Légende proposée par l'auteur de l'article : "Scène de banquet de l'Ancien Testament" (f. 138... en fait, 318... Mais pas vraiment... C'est le système de la publication numérique. Le vrai folio est 155).
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f. 155, G (gauche) A et G a Histoire de Job et commentaire. (photo ÖNB Vienne) |
Si vous avez pris la peine de lire le lien ci-dessus, vous savez que les Bibles Moralisées sont constituées de la Bible (Ancien Testament et Apocalypse dans le cas de 1179) et de "commentaires". Les scènes s'alternant. On a donc Aa (A Ancien Testament/ a "commentaire"), Bb Cc Dd sur chaque folio, ou G1, G2, G3, G4, D1, D2, D3, D4, ou, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, selon les spécialistes. Soit 8 scènes (les impairs correspondant à l'AT, les pairs aux commentaires). En prime, selon les manuscrits, les images se lisent d'abord de haut en bas (Vienne 1177, par exemple), ou de gauche à droite (Vienne 2554, où là on a AB ab CD cd, et les de la colonne de droite sont sur la droite alors que sur 1179, on a les textes à gauche de l'image que l'image soit à gauche ou a droite). Comme toujours, la lecture des images médiévales demande de s'adapter à chaque manuscrit. Cette image de Vienne 1179 est a ou 2, A étant un épisode des histoires de Job (où celui ci discute avec ses derniers amis). L'image publiée dans l'article n'est pas une scène de l'Ancien Testament, mais le commentaire. (J'espère que c'est clair, avec ces systèmes différents... Mais en fait, c'est simple quand on a l'habitude).
Ceci est le premier problème concernant cette légende.
Ensuite, "Scène de banquet". Il se trouve que quelques pages plus tôt (f. 144), on trouve une authentique scène de banquet de l'Ancien Testament, celui des enfants de Job. Et on note une différence majeure entre les deux : la table. Un repas sans table, cela s'appelle un pique-nique. Quoique, lors d'un pique-nique, il y a une nappe. En fait, un repas de ce type, c'est plus soirée crêpe dans une chambre de cité-universitaire où on se case comme on peut...
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Banquet des enfants de Job, f. 144. (photo ÖNB Vienne) |
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folio 155 (photo ÖNB Vienne) |
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Conseil lecture |
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Conseil lecture |
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Conseil lecture |
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Conseil lecture |
Extrait du site legifrance.gouv.fr
Article L122-5
Version en vigueur depuis le 26 novembre 2021
Modifié par Ordonnance n°2021-1518 du 24 novembre 2021 - art. 1Lorsque l'oeuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire :
3° Sous réserve que soient indiqués clairement le nom de l'auteur et la source :
a) Les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d'information de l'oeuvre à laquelle elles sont incorporées ;
b) Les revues de presse
[L'article que j'ai écrit relève bien de ces exceptions : critique, polémique, pédagogique, scientifique ET information, même si l'aspect polémique est limité, vu qu'il est facile de démontrer les erreurs récurrentes indéniables.]
Les exceptions énumérées par le présent article ne peuvent porter atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ni causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur.
[Les nombreux problèmes relevés dans l'article publié justifient totalement l'écriture de ce billet de blog.]
Mon seul tort a été de vouloir épargner une gêne certaine à l'auteur en le citant, et une gêne moindre au magazine dont la bonne foi ne fait aucun doute. Après mûre réflexion, j'ai préféré réparer cette erreur.
Tina (et non Martine, qui reste réservé à l'état-civil et à l'administratif et à certains membres de la famille âgés qui n'ont jamais pu s'y faire !) Anderlini, docteur en histoire de l'art.